Arrivé au Sénégal fin février pour quelques mois, mon intention était de passer du temps en volontaire lors de mon séjour pour réactiver et enraciner l’enseignement d’OpenStreetMap au sein des structures d’enseignement liées ou proches de la géomatique dans le pays, qui semblent ne pas s’être poursuivies depuis fin 2013, alors que des formations menées par la communauté OSM SN ont eu lieu sous forme de cartoparties ouvertes à tous ou dédiées à des employés communaux. Cette action devait en plus préparer idéalement le terrain à un futur Volontaire International de La Francophonie OSM dont la mise en place avait été proposée à l’OIF.
Je pensais au départ que je me déplacerais entre Dakar, Ziguinchor et Saint-Louis, mais les activités sur Dakar comme le manque de conditions sur Ziguinchor (une longue grève étudiante) ont fait que je suis resté dans la péninsule.
Lors des premières rencontres avec enseignants et étudiants, j’ai découvert que la mode pour la numérisation sur imagerie au Sénégal était à l’utilisation conjointe de Mobac, un logiciel que je ne connaissais pas, et ArcGIS. Une bonne bidouille d’étudiant dans laquelle j’aurais certainement adhéré moi-même à l’époque de mes études, mais un peu dommage à celle où une imagerie à haute résolution (Bing) déjà géoréférencée permet, en toute légalité, de contribuer à une base de données ouverte détaillée dans laquelle on bénéficie de contributions existantes, à l’aide de multiple modèles d’attributs au sein d’un logiciel d’édition très puissant (JOSM). Car a contrario, avec Mobac+ArcGIS, c’est un processus d’extraction d’imagerie supplémentaire via Mobac, une numérisation avec ArcGIS, un logiciel moins fort en édition vectorielle que JOSM, le plus souvent sans aucun modèle d’attributs, qui aboutit, cerise sur le gâteau, à une donnée totalement illégale, qui de fait ne peut être redistribuée.
Mon volontariat a démarré rapidement au CEDT (Centre d’Entrepreunariat et de Développement Technique) dit aussi G15 et sis à Colobane, qui dispense le seul diplôme officiel spécifiquement dédié à la géomatique au Sénégal, sous la forme d’un BTS. Les formations OSM y avaient débuté dès 2012, dans le cadre d’une mission de l’ONG HOT mené par Nicolas avec l’aide de Will et Stéphane, puis suivi par une autre mission en 2013, le volontariat d’Augustin et la mission OIF de traduction de LearnOSM à laquelle j’avais participé. A ce moment, l’idée de faire un enseignement sur l’ensemble d’un trimestre ou d’un semestre avait été évoquée avec Augustin Ndiaye, qui gère entre autres ce cursus au sein de l’école. Lorsque je lui ai annoncé mon arrivée fin février, il a été particulièrement réactif, de sorte que ma première intervention avec les deuxièmes années a eu lieu le 4 mars, et le 9 avec les premières années.
Les deuxièmes années étaient pour moi un challenge motivant car chacun d’entre eux travaille chacun sur un « projet intégrateur » de fin d’études sur une thématique (éducation, accidentologie, incendies, assainissement) ou une zone (en particulier des SIG communaux multi-thématiques) dans lesquels OSM pouvait être une composante forte. Malgré un enthousiasme important au début, ces étudiants ont vite été pris dans l’angoisse du dossier noté à rendre et des données à devoir collecter, et ont préféré en rester avec ce qu’ils maîtrisaient déjà (le fameux couple MOBAC+ArcGIS). Au final, cette promotion du G15 semble malheureusement perdue pour OSM et les données qu’ils auront collecté rejoindront toutes celles qui dorment sur des disques durs d’anciens étudiants de par le monde. Une leçon à retenir : il faut avoir le temps d’ancrer OSM dans les esprits pour les convertir par rapport à d’autres processus, fussent-ils limités. Par conséquent, les premières années du BTS géomatique du G15 semblent un bon terreau pour espérer que leur projets intégrateurs s’appuient sur OSM. A partir du 9 mars, chaque lundi en dehors des périodes de vacances et des jours fériés, j’ai pu enseigner OSM à ces étudiants avec l’aide ponctuelle d’Ismaila, Amadou, Jean-Marie et Lamine. Je reviendrai dans un prochain billet à part pour partager l’expérience de cet enseignement, le challenge de former souvent seul 20 étudiants avec un internet relativement limité, et le bilan du projet OSM personnel à rendre demandé à chacun d’entre eux, en plus d’un examen final sur table qui feront partie des notes de leur cursus.
Les choses ont mis plus de temps à se mettre en place à l’UCAD, mais elles sont désormais bien engagées. Là encore, les formations OSM remontaient aux missions de l’ONG HOT en 2012 et 2013 et le volontariat d’Augustin. Je n’avais fait moi-même qu’un bref passage à l’UCAD jusqu’à présent, l’année dernière dans le cadre d’une séance de présentation conjointe faite avec Bass auprès du groupe travaillant avec l’IRD. Grâce à la mise en contact faite par Nicolas, familier des lieux depuis 1998, et suite à deux rencontres avec les professeurs (notamment Aminata Ndiaye, Honoré Dacosta et Aminata Niang Diene) et enseignants (notamment Momar Diongue et Sidia Badiane) de géographie a eu lieu en mai une présentation de 3 heures d’OSM en amphithéâtre devant les étudiants de master de la discipline, plus nombreux qu’envisagé (sans doute plus de 150 !).
J’avais l’ambition de terminer par une démonstration d’OSMAnd avec en parallèle, une installation de l’appli et de ses données par Lamine pour que les étudiants puissent repartir avec l’appli et savoir s’en servir. Mais jongler avec la nouvelle version de l’appli (passée à la v2 avec sa toute nouvelle interface), les versions d’Android et les multiples problèmes de mémoire ou autres soucis est un sport qui réclame du temps, et nous n’avons pas été en mesure d’en installer plus une quinzaine, malgré le renfort d’Amadou, passé présenter la communauté OSM_SN entre ses devoirs d’étudiant à rendre. Une bonne leçon pour le futur ! Pour autant, la démonstration a bien eu lieu comme prévu avec des aperçus écran préparés la veille et les étudiants ont pu mesurer ce qu’une donnée libre permettait de faire avec une bonne appli.
A cette action de sensibilisation a suivi la mise en place, deux jours par semaine, d’ateliers de formations ouverts à un groupe réduit de 10 personnes, mêlant jeunes enseignants de géographie et étudiants représentants de différents classes de deuxième année de masters (Climatologie, Gestion et Développement des Espaces Ruraux, Aménagement et Gestion Urbaine en Afrique) dans le but de former une équipe de formateurs au sein de l’UCAD, chargés ensuite de transmettre leurs nouveaux savoirs à leurs étudiants ou condisciples de master dans des séances de restitution ou des enseignement de géomatique. En plus un nombre plus réduit qu’au G15, je dispose de l’appui constant et fort efficace de Lamine, qui se rend disponible les mardi et jeudi pour enraciner OSM dans l’UCAD.
Ce programme devrait se poursuivre jusqu’à la fin du semestre, suivi par la suite de séances de restitution, le but étant que l’UCAD devienne autonome dans la formation OSM. Là aussi, un prochain billet de blog reviendra plus en détail sur ces activités, mais pour résumer 6 séances ont déjà eu lieu, dont une collecte de terrain d’objets santé en lien avec tous les étudiants du master Gestion et Développement des Espaces Ruraux, pour qui savoir comment collecter des données constituait une demande répétée. Ce fut l’occasion pour les dix nouveaux formateurs de mettre en pratique pour la première fois leurs connaissances sur OSM auprès de ces étudiants.
En dehors du suivi de la communauté OSM SN, les structures d’éducation liées à la géomatique au Sénégal bénéficieront de l’appui d’un Volontaire International de la Francophonie à partir de novembre pour un an. Cette personne sera officiellement rattachée au G15, mais de par sa fiche de mission, sera amenée à former dans l’ensemble du pays. Comme le dit Honoré Dacosta, cette fois nous espérons tous que « la mayonnaise prenne ».